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Accueil du site > Actualités > Economie > L’Amérique tousse, l’Europe s’enrhume

L’Amérique tousse, l’Europe s’enrhume

Quand la finance américaine tousse, son économie s’enrhume et la planète panique. L’Europe pâtit toujours des crises américaines. Cela a été révélé dès 1929. Déjà à cette époque les marchés financiers planétaires bien que rudimentaires, opaques, manuels, matérialisés, inorganisés, non contrôlés... s’inscrivaient en cercles concentriques autour de leurs homologues américains. Suite à des surinvestissements ne correspondant pas au volume de la demande, le défaut de paiement massif des emprunteurs avait entrainé celui des banques créancières qui, elles-mêmes, par ricochet, avaient fait défaut à leurs propres prêteurs bancaires et transformé une simple toux en quinte spectaculaire puis en crise systémique d’ordre planétaire. Première du genre. Des licenciements, des faillites en chaîne, des dizaines de millions de chômeurs sur tous les continents et, in fine, l’avènement en Europe du nazisme.

Alors, quoi de semblable dans la toux américaine de 29 et celle d’aujourd’hui ?

Tout ou presque, au départ ! A la grande différence cependant, c’est que depuis 29 et surtout depuis la deuxième moitié du XXe siècle, les marchés financiers se sont terriblement sophistiqués, institutionnalisés, informatisés, sécurisés, structurés, organisés, dématérialisés et mondialisés. Les banques ont largement fait de même et leurs autorités de tutelle et de contrôle, les banques nationales et centrales, leur ont imposé la mise en place de ratios prudentiels, dits de solvabilités, actuellement nommés Mc Donough après avoir été ceux de Cooke. Cette sécurisation extrême se poursuit et, dès 2008-2009, entreront en service de nouvelles normes, dites de Bâle 2, sous l’égide de la Banque des banques : la fameuse BRI (Banque des règlements internationaux, localisée à Bâle).

Comme la crise d’aujourd’hui, celle de 29 était aussi une crise de liquidité. Mais à l’époque, aucune banque nationale n’avait su réagir rapidement, de manière adéquate. Toutes étaient plus ou moins soumises à d’obscurs pouvoirs politiques, bien que dirigées par des familles de la sphère privée. Aujourd’hui, cela n’est fort heureusement plus du tout le cas. Ces mêmes banques sont des banques d’Etat, indépendantes des gouvernements et ont, pour la plupart, leur "maison mère" telles la Fed et la BCE. Ces dernières n’attendent pas, dès les prémices d’une crise, les hypothétiques ordres des gouvernements pour agir rapidement, massivement et de manière souvent concertée. Louons aujourd’hui l’indépendance de la BCE - tant décriée par la France - et de la Fed. Imaginons que la BCE ait attendu l’ordre des treize gouvernements de l’Euroland pour injecter des liquidités. Idem pour la Fed, de son côté ! Cela aurait sûrement pu déclencher une réplique de 29. N’oublions pas qu’aujourd’hui, chaque jour, plusieurs milliers de milliards de dollars, d’euros et de yens changent de main via les réseaux électroniques, sans aucune interruption horaire et sans aucun accroc notable. Tout cela est rendu possible par la technologie, par la sécurité, mais aussi et surtout grâce à la confiance qu’ont su instaurer les autorités de tutelles entre prêteurs et emprunteurs de la sphère bancaire nationale et internationale.

Et malgré cette hyper performance des marchés planétaires, si l’Amérique tousse, la planète continue encore à s’enrhumer, voire à paniquer. Pourquoi ?

L’une des explications ne vient pas du manque de transparence, comme le dit le gouvernement français en reprenant point par point les propos de la chancelière allemande. Si la transparence vis-à-vis du public n’est naturellement pas de mise, bien sûr, celle institutionnelle est totale. Les autorités de tutelle nationales et centrales, de toutes les banques occidentales savent parfaitement, dès la fin de chaque mois, le niveau de risque pris par chaque banque et notamment celles ayant des activités internationales d’investissements (cf. ratios supra). Et, les plus grosses contreparties, en termes de risque de crédit, sont connues, mêmes si elles sont logées à l’étranger.

Alors, si ce n’est pas la transparence ni l’absence de contrôles de plus en plus rigoureux, quel est le sous-jacent de cette panique ?

L’explication est simple et bien connue de tout le monde, même politique. C’est le fait que l’économie américaine est, depuis la fin de la Première Guerre mondiale, le moteur économique de notre planète et aussi son comburant. L’épicentre de la mondialisation du XXe siècle et, pour quelque temps encore, celui du début du XXIe siècle.

Aujourd’hui, même si le moteur planétaire yankee a tendance à se dédoubler et à laisser son ersatz se déplacer rapidement vers l’Asie, quand 300 millions d’Américains toussent, c’est encore 6 200 millions d’individus qui s’enrhument et qui paniquent.

Et demain, si 1 300 millions de Chinois venaient à tousser, que se passerait-il ? Et les 1 100 millions d’Indiens ? Et si Chinois, Indiens et Américains toussaient de concert, quelles en seraient les conséquences pour l’Union européenne ?

L’Europe peut-elle continuer à être soumise aux crises de toux des uns et des autres et être ballottée d’Est en Ouest ?

Cette nouvelle crise d’outre-Atlantique doit au moins nous permettre d’accélérer la construction d’une Europe puissante tant au niveau économique que politique.

Nous en avons largement les moyens. Il suffit de les fédérer... !


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7 réactions à cet article    


  • tvargentine.com lerma 24 août 2007 11:43

    La crise financière au USA n’a rien à voir avec une crise boursière ,car les entreprises font des bénéfices et produisent des biens de consommation qui se vendent.

    en France la croissance repose principalement sur la résistance de la consommation et la bulle immobilière, toutes deux entretenues par la forte augmentation de l’endettement.

    Les banques et les organismes de crédits vont devoir être plus prudents quand les prix de l’immobilier vont commencer à baisser afin de ne pas perdre d’argent et le problème pour le gouvernement sera de ne pas trop fermer le robinet du crédit afin d’avoir de la croissance économique,créatrice de richesse et d’emplois.


    • Nemo 24 août 2007 11:58

      Bonjour,

      Vous allez probablement pouvoir m’éclairer sur la question des déficits jumeaux, et de leur financement par l’excédent de la balance des paiements américaine. J’ai l’impression - mais il me manque peut-être un certain nombre d’éléments factuels sur le sujet - que nous sommes en quelque sorte pieds et poings liés.

      Quelques éléments sur lesquels mon impression se fonde :

      - La croissance mondiale est « tirée » par une consommation américaine forte et durable, soutenue par un déficit budgétaire important, et qui se traduit par une balance commerciale très déficitaire.

      - Cette consommation américaine est financée par un crédit abordable, alimenté par une balance des paiements très excédentaire, en raison de l’attractivité des marchés financiers américains, et du fait que le dollar est la principale monnaie des échanges internationaux.

      Mon impression est la suivante : cette situation n’est pas tenable ad vitam aeternam. Mais si une correction a lieu, elle aura forcément un impact très négatif sur la consommation américaine. Et si l’on touche à la consommation américaine, on touche à la croissance mondiale.

      De là, plusieurs questions :
      - Ces hypothèses tiennent-elles la route, ou il y a-t-il des erreurs factuelles dans ce que je viens d’énoncer ?
      - Si ces hypothèses tiennent la route, il y a-t-il selon vous une alternative à ce scénario pessimiste ?
      - Et s’il n’y a pas d’échappatoire, quels pourraient être les facteurs qui atténueraient les impacts négatifs d’une telle correction ?

      En vous remerciant,


      • Forest Ent Forest Ent 24 août 2007 12:08

        AMHA...

        Ce que vous écrivez est exact.

        Il n’y a pas d’alternative.

        Il est trop tard pour mettre en place des mesures préventives.


      • Forest Ent Forest Ent 24 août 2007 12:06

        On ne peut qu’être d’accord sur le fait que les US aient été le moteur de la consommation mondiale. Elle a été financée par le reste du monde, en particulier les pays exportateurs.

        Ce n’est pas que par hasard. Cela découle de leur puissance militaire et de leur capacité à « sécuriser les approvisionnements de matières premières » (doux euphémisme).

        L’UE n’a même pas été capable de sécuriser la Yougoslavie, au contraire. Ca montre le chemin qui reste à parcourir.

        Il ne peut y avoir d’Europe-puissance sans Europe politique, et il faut pour cela une légitimité, par exemple électorale, qui fait cruellement défaut.

        Nous restons pour un moment une lointaine province romaine. Et si l’empire décline, qu’allons-nous faire ?


        • Mohammed MADJOUR (Dit Arezki MADJOUR) Mohammed 24 août 2007 12:10

          @l’auteur

          « L’Amérique tousse, l’Europe s’enrhume »

          L’Europe s’inquiète aussi parce que les relations sont très affectives entre Elle et « l’Amérique ».

          Ce n’est pas une question de sous, la crise n’est donc pas économique mais ...génétique.

          « L’Amérique » est l’enfant terrible de la Vieille Europe, vous comprenez ?

          Les Colonies françaises des Océans et la Super Colonie Américaine resteront l’éternel témoignage du débordement de la Vieille Europe sur le reste du Monde !

          La planète a raison de paniquer aussi parce que précisément c’est l’ensemble de la famille européenne toute génération confondues qui mène le Monde par son estomac ! C’est l’Inébranlable Ordre Economique Mondial !

          MOHAMMED.


          • Tzecoatl Tzecoatl 24 août 2007 14:58

            A défaut d’être fun, c’est hyper piouffant les marchés financiers.


            • moebius 25 août 2007 00:51

              C’est un fait l’Europe ne sait pas gerer ce genre de crise

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