Clash-flow : le Marteau sans maître
Structures d’endettement, contreparties incertaines, lorsque la finance structurée révèle la création de fausse monnaie et d’actifs artificiels.
Anticipant au regard de la crise des subprimes les conséquences économiques probables d’un système dérégulé et consolidant ses présentations faites dès décembre 2007 dans le cadre du séminaire économique Franco-russe, le professeur Jacques Sapir (EHESS) avait souligné dans un article publié en mai 2008 qu’une garantie gouvernementale était inévitable et que la création d’une caisse de défaisance pour les banques serait indispensable. (Voir J. Sapir, “Global finance in crisis” in Real-world economics review, n° 46, 18 May 2008, www.paecon.net/...)
Il n’est peut-être pas exclu que l’on en vienne bientôt à cette extrémité dès lors qu’aujourd’hui les avertisseurs d’incendie commencent à couvrir les propos apaisants sur la solidité du système bancaire français malgré la mise en avant d’une « garantie d’Etat » opportunément mise en œuvre avec le plan-catastrophe de recapitalisation-nationalisation de la banque franco-belge Dexia, devenue incapable de se refinancer sur les marchés, concocté en urgence avec
Mais il y a surtout une grave raison de douter aujourd’hui de la capacité des pompiers à maîtriser les flammèches qui courent çà et là dès lors que ce sont pour partie les mêmes thuriféraires d’un Marteau sans maître qui n’ont pas vu venir cette explosion de fumées, ce backdraft financier que l’on tente de circonvenir.
Démonstration : "Les ménages français sont aujourd’hui les moins endettés d’Europe. Or, une économie qui ne s’endette pas suffisamment, c’est une économie qui ne croit pas en l’avenir, qui doute de ses atouts, qui a peur du lendemain. C’est pour cette raison que je souhaite développer le crédit hypothécaire pour les ménages et que l’Étal intervienne pour garantir l’accès au crédit des personnes malades. Je propose que ceux qui ont des rémunérations modestes puissent garantir leur emprunt par la valeur de leur logement. Il faut réformer le crédit hypothécaire. Si le recours à l’hypothèque était plus facile, les banques se focaliseraient moins sur la capacité personnelle de remboursement de l’emprunteur et plus sur la valeur du bien hypothéqué. Ceci profiterait alors directement à tous ceux dont les revenus fluctuent, comme les intérimaires et de nombreux indépendants."
De qui sont ces propos ? De M. Nicolas Sarkozy lui-même . A quoi a-t-on échappé...(Source(s) Interview Revue Banque (avril 2007 - Interview dans la revue
www.econ.princeton.edu/seminars/WEEKLY%20SEMINAR%20SCHEDULE...
Que banquiers et assureurs aient été convoqués à l’Elysée après le laborieux discours de politique économique de Toulon du 25 septembre dernier, ou encore que ce soit à
Les propos du même auteur rappelant qu’il existait désormais « un large accord pour dire qu’aujourd’hui n’est plus comme hier et que les dogmes qui ont valu au niveau européen en ce qui concerne la libre concurrence, le fait qu’on s’interdirait d’avoir des aides d’Etat", avaient en quelque sorte vécu, apportent une démonstration éclatante du fonctionnement erratique d’un système de navigation pourvu de coordonnées erronées, certes, mais aussi assorti d’un équipage qui vous explique sans sourciller qu’il vient de remettre la carte à l’endroit afin d’en rendre la lecture plus aisée...
La réalité est toute autre et le contrôleur au sol est là pour rappeler quelques données radar et montrer à l’avion qu’il a quitté sa route :
« Quand on comprime les revenus salariaux pour toujours plus de profits et que l’on cherche dans la financiarisation de l’économie une porte de sortie à la contradiction qui veut que toute compression des revenus induira celle de la demande solvable, donc celle du niveau d’activité et donc celle du volume des profits, alors la dérégulation financière et l’emballement de la machine à crédit au delà de toute borne prudentielle – au point où l’on en arrive à parler de prêt « prédateurs – deviennent logiques », écrit Jacques Sapir.
« Il y a aussi du système dans cette folie, ajoute-t-il, quand on prétend, comme le fait le gouvernement français, développer une mentalité de propriétaire à travers l’immobilier tout en menant une politique de déflation salariale, que l’on justifie au nom de l’ouverture économique alors que cette dernière a été justement initiée pour accroître les pressions sur les salariés. Ainsi, François Fillon et Nicolas Sarkozy sont par leurs politiques, et l’approbation donnée au système des hypothèques rechargeables en France, les vecteurs mêmes des dévoiements de la finance qu’ils peuvent par ailleurs condamner. Les institutions du néo-libéralisme finissent par induire chez les acteurs au centre du système les représentations qui conduisent à leur renforcement permanent et ce jusqu’au jour où le même système va heurter de plein fouet le mur des limites de sa propre reproduction. Où donc est le dévoiement ? Dans les pratiques financières ou dans la pensée de ceux qui mettent en place les réformes qui rendront non seulement possible mais encore inévitable car nécessaires les emballements dont les Etats-Unis, mais aussi
A l’image de cet appareil de navigation de précision que constitue une centrale inertielle, avec ses gyroscopes, ses accéléromètres et ses capteurs de vitesse angulaire qui permettent à l’avion de calculer sa position, son altitude, son assiette et son cap , pourvu qu’ils soit préalablement convenablement paramétré, l’économie a besoin d’un nouveau pilote comme d’un nouveau plan de vol.
Pour ce qui relève de l’économie la conclusion est simple : le rêve passéiste d’un futur national libéral qui a laminé l’économie réelle vient d’exploser. devant nos yeux.
Pour ce qui relève des finances, la mise au tapis de la bancassurance et des systèmes dérivés est programmée, le meilleur restant à venir avec le refus des épargnants de participer à la socialisation des pertes.
Sources et contributions :
Mike Whitney : à quand les soupes populaires ? Mike Whitney, Information Clearing House, 11 septembre 2007, paru le 13 septembre 2007, sous
http://contreinfo.info/article.php3?id_article=1234
« Les booms du crédit ne se terminent pas en inflation comme la plupart le croient. Les booms du crédit SONT de l’inflation et se terminent par la déflation. Ce boom du crédit n’est en rien différent. »
-Mike Shedlock,
“Mish’s Global Economic Trend Analysis” http://globaleconomicanalysis.blogspot.com/
Paul Jorion,
L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008)
-Rapport moral sur l’Argent dans le Monde 2008. La crise des finances. L’accès des particuliers aux services bancaires. Les enjeux éthiques (responsabilité sociale des entreprises du secteur financier, participation et actionnariat salarié, lutte contre la corruption), édité par l’Association d’économie financière - Caisse des dépôts.
- Lire aussi l’excellent article de Yann Moulier Boutang , Le prisme de la crise des subprimes : la seconde mort de Milton Friedman. Financiarisation et crise des subprimes :cartographie des parutions récentes, publié dans
- On lira particulièrement ci-après, tiré des Actualités de la recherche en histoire visuelle de l’EHESS, le remarquable article du professeur Jacques Sapir, Sept jours qui ébranlèrent la finance, consacré à ce tremblement de terre financier dont les répliques n’ont pas fini de se succéder, semaine agitée qui marquera probablement un tournant dans l’histoire économique du XXIème siècle.
www.arhv.lhivic.org/index.php/2008/09/22/816-sept-jours-qui-ebranlerent-la-finance - 82
par Jacques Sapir, lundi 22 septembre 2008 à 22:26 (2855 vues, permalink, jours qui ébranlèrent la finance">rss co) :: Comptes rendus
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