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Accueil du site > Culture & Loisirs > Étonnant > La grande culture française

La grande culture française

Une anecdote raconte qu’en 1643, alors que le roi Louis XIV a 5 ans, le grand Corneille vint à son trône avec une quinzaine de jeunes gens et lui dit ces mots : « Sire, j’ai l’insigne honneur de présenter à votre majesté : Henri de la tour d’Auvergne, Nicolas Mignard, Abraham Duquesne, François de la Rochefoucauld, André Le Nôtre, Paul de Gondi, Charles Lebrun, Jean de la Fontaine, Blaise Pascal, Bossuet, Sébastien Vauban et Jean Racine ». Une fois tous nominativement présenté, Corneille ajouta merveilleusement : « Sire, voici votre siècle ».

Le soir du 6 mai 2007, Nicolas Sarkozy, alors fraîchement élu président de la République, présenta quant à lui à la France entière Faudel, Doc Gyneco, Arthur, Steevy Boulay, Enrico Macias, Mireille Mathieu, Bob Sinclar et miss Dominique. Messieurs, Dames, voici notre siècle.

Evidemment, les choses changent, évoluent, digressent naturellement ; mais enfin pardonnez-moi si je constate avec amertume les différences de culture entre des temps glorieux et notre époque si prosaïque. Et d’ailleurs, inutile de remonter au XVIIe siècle pour remarquer par comparaison un évident déclin : il n’y a pas si longtemps encore la France pouvait s’enorgueillir d’un Camus, d’un Sartre, d’un Malraux, d’un Foucault, d’un Aron et d’un Cioran (et j’en passe). Je sais pourtant bien que le grand Sacha Guitry disait qu’on a toujours du mal à concéder du génie à nos contemporains, mais enfin je sais aussi que, si dans cinquante ans on vénère le génie d’un Arthur, d’un Faudel ou d’un Steevy, c’est que l’on a vraiment un grave souci à se faire sur les artistes que subiront nos enfants.

Mais ce n’est pas qu’un jeune citoyen comme moi passionnément amoureux de notre culture qui professe un tel jugement ; celui-ci est presque unanime : le Times du 3 décembre 2007 ne titrait-il pas, de manière nullement irénique, que la culture française était morte ? Beaucoup de Français, chauvinisme oblige, ont réagi avec véhémence contre une telle arrogance anglo-saxonne ; d’autres se sont interrogés : si la culture française est morte ou se meurt, quelles en sont les raisons ? Et surtout, comment remédier à une telle hérésie ?

La raison de ce déclin si fatal se trouve dans les sources de la culture. Voilà presque quarante ans que celles-ci sont invariablement le cosmopolitisme et l’universalisme (non plus perçu comme auditoire de sa propre culture, mais désormais comme sa source). Or, si je peux concéder que ce sont des sources valables, force est de constater qu’elles se sont maintenant taries aux vues de la nullité actuelle. Cependant, la source inépuisable de la culture se trouve dans la tradition comme étant un capital à transmettre de génération en génération et, par chance, nous avons sans doute en France l’un des plus riches - voire le plus.

Le problème réside donc dans nos écoles. Je prendrai un exemple révélateur à savoir la place désormais donnée au XVIIe siècle dans l’instruction d’aujourd’hui : jadis tous les jeunes de France avaient étudié Le Cid de Corneille, connaissaient Molière et Racine et pouvaient citer des vers de la Fontaine et de Boileau. Aujourd’hui, c’est à peine si l’on fait étudier en entier le Candide de Voltaire. Imprégnés de telle manière du siècle classique des lettres françaises, il n’y avait aucun souci à se faire sur la continuité et le rayonnement de notre langue, et enracinés dans la tradition de l’esprit français, tous arts, toutes idées et toutes phrases ne pouvaient être que la glorieuse continuation de la véritable et belle culture dont nous héritons et dont nous avons le devoir de transmettre et de faire vivre.

Il faut donc revenir aux sources, à nos vraies sources. Le salut de la culture française passera obligatoirement par un re-racinement comme l’entendait Barrès. Une fois revenus à nos fondamentaux, c’est-à-dire à nos racines - qu’elles soient historiques et culturelles, nous verrons se vérifier ce que Julius Langbehn proclamait : « Concentration signifie attraction  ». Une fois re-concentrés sur nous-même - et ayant de ce fait retrouvé notre identité, notre culture recouvrera inévitablement son attrait dans le monde entier. Cela ne veut pas dire qu’il faille se couper du monde et se transformer en ethnocentriste borné, loin de la ! Michelet disait à ce propos (sur l’école publique nationale) : « L’enfant saura le monde, mais d’abord qu’il se sache lui-même en ce qu’il a de meilleur, je veux dire la France ».


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14 réactions à cet article    


  • tSbeNjY tSbeNjY 4 février 2008 16:15

    Style agréable et clair, même si tout cela manque un peu de profondeur.

    Je plusse.

    C’est vrai que Steevy comme chantre de la culture française, ça fout un coup au moral...


    • Hecatonchire 4 février 2008 16:49

       Hélas, trois fois hélas. Vous avez sans doute raison en ce qui concerne la prédominance des grands penseurs français lors des siècles passés mais encore faut-il pondérer cette vision par un biais ethnocentrique conforté par la prédominance civilisatrice européenne, militaire et économique d’une époque révolue.

      Aujourd’hui le génie est plus universel et partagé, mondialisé dirait certains.

      L’attribution des prix Nobel en est un exemple parmi d’autres, où l’on constate que la proportion des découvreurs et penseurs européens ne fait que baisser par rapport au reste du monde, ce qui en soi est absolument logique à moins de théoriser une suprématie intellectuelle intrinsèquement ethnique que nos aïeux n’hésitaient pas à revendiquer et dont on sait aujourd’hui le vrai nom : Racisme.

       Mais sur le fond vous avez raison d’interroger l’Ecole. Sommes nous encore capable de fabriquer des élites intellectuelles. Nous voyons bien que cette machine agit plutôt comme un rouleau compresseur qui nivellerait par le bas plutôt que comme une découvreuse de talents.

      Mais là encore, il faut comparer ce qui est comparable. Les noms illustres qui vous avez cités sont issus pour l’essentiel de la petite et grande noblesse de l’époque et à ce titre ils ont bénéficié d’une éducation hors norme même pour l’époque actuelle.

      Serions nous capable aujourd’hui d’apporter le même soin à l’éducation de nos chers bambins en individualisant les cursus, qu’il ne faudrait pas plus d’une ou deux générations pour voir émerger à nouveaux de libres penseurs.

       Individualiser, cela veut dire en finir avec les classes de 40 élèves et les cours magistraux.

      Chaque élève devrait avoir son mentor, un professeur qui le suivrait dans tout son cursus, de la petite école à l’université.

      Il faut en finir aussi avec le concept de classe d’age et de la honte intellectuellement castratrice qui fait qu’un redoublant est à jamais marqué par le sceau de l’échec.

      L’école est devenu un cauchemar pour de plus en plus d’enfants. C’est autant d’enfants qui n’auront jamais l’opportunité de développer un talent.

      Combien de professeurs désabusés ai-je déjà entendu proférer cette insanité :

      - Lui, il ne fera jamais rien de bon dans la vie, c’est un cancre.

      - Mais il n’a que 7 ans !?

      - Oh vous savez, certains sont limités, on peut rien faire, et puis il faut bien suivre le programme.

       Rideau.


      • roOl roOl 4 février 2008 16:56

        Télé réalité, culture McDo, et arrivisme...

        On a que ce que l’on merite... mais ne vous inquietez pas, les vrai genies oeuvre dans l’ombre, et ce n’est certainement pas Sarkosy ou les producteurs télé qui vont les repérés.


        • Cascabel Cascabel 4 février 2008 21:51

           

           

           

          Bel article, merci l’auteur.

          Avant nous avions Chirac, un grand dadais maladroit, un peu inculte, avec le sourire du commercial. Il racontait toujours un peu n’importe quoi, sans jamais connaître la peur du ridicule. Nous croyions avoir touché le fond, après lui pensais-je ce ne pourra pas être pire. Et bien si.

          Nous voici avec un nabot grimaçant, non pas inculte mais crassement ignare, non pas maladroit mais malotru. Nous avons eu droit à ses prestations royales à Eurodisney puis cerise sur le gâteau il vient de faire première dame de France une personne trouvant les Français "miserable" (miteux en anglais), se faisant photographier à poil, et ayant tapiné un peu partout dans la jet-set. Que demander de plus ?

          A ce stade là ne peut-on pas d’ores et déjà considérer la France morte enterrée ?

           


          • karquen karquen 4 février 2008 22:37

            heuuu.....

            Je ne suis pas Chiraquien. Mais tout de même, Il est d’une culture relativement brillante. Des musées du monde entier l’appelle parfois pour demander des conseils sur telle ou telle pièce d’art africain ou asiatique. Il nous a aussi éviter d’aller en Irak, dans ce bourbier de sang pétroliers à plus-values d’actionnaires.


          • Cascabel Cascabel 5 février 2008 00:35

            @ Karquen

            1 Question pour un champion : quels ouvrages a écrit Chirac à propos des arts ?

            2 Chirac a participé activement à la destruction d’un pays voisin : la Yougoslavie. L’argent de mes impôts à servit à bombarder des ponts, des hôpitaux, des usines, des marchés, etc d’une nation déjà pas très riche. Après l’agression militaire de l’OTAN la plupart des monastères et églises du Kosovo sont partis en fumé, sous les yeux médusés des militaires français, ils avaient ordre de laisser faire. Qui est dnc est le chef des armées en France ? De même 80 pour cet de la population serbe à été chassé de chez elle, violemment, toujours sous les mêmes yeux médusés de nos militaires.

            3 Quatre vingt trois pour cent des Français ont voté chi-chi en 2002, il fallait bien qu’ils se rassurent quelque part, l’Irak à servit de cache sexe. La vérité c’est que Chichi ne pouvait pas y aller, trop de Français étaient contre (autant qu’il a eu d’électeurs, et même plus) et qu’en plus nos forces comptent aujourd’hui pour du beurre. Le plus simple pour lui donc était de ne pas y aller. Cela s’appelle de la facilité, pas du pacifisme. Le Kosovo a été le vrai test et il ne l’a pas passé.


          • karquen karquen 6 février 2008 01:00

            Oui.

            Je parlais de culture. D’art et de connaissances sur les traditions. Chirac est une personne très efficiente en la matière. On peu pas lui retirer cette qualité !

            Pour ce qui concerne le Kosovo, l’acharnement médiatique contre les serbes sous les vices d’un Mittérand omniprésent, de la pression allemande mondialidste, je dois avoué que vous n’avez pas tout à fait tord.

            Je ne comprend pas pourquoi, on ne donne pas aux serbes la "présence" logique, finalement, dans un conssenssus commun qui est l’Europe. Bisard, les Serbes portent encore une étiquette néo-nazi marxiste et anti-sionniste, alors que ce sont deux grands yeux ouverts sur une réalité plurielle.

            On parlait de mondialisme ? je pense que le monde est manipulé par un groupe (Bildegerg) et des organismes qui nous empêche une fraternité universelle... une fraternité de 2000 ans avans le christianisme, là où l’Europe Celtique allait d’Irlande aux portes de la Turquie.

            mais ne pensons pas en arrière, voyons devant ! demain les alliés seront les ennemis et les ennemis des alliés celon le bon vouloir automatique d’un mondialisme d’auto-génèse...

             


          • moebius 4 février 2008 23:11

            article versaillais en diable, tout emprunté onctueusement de cette trés particuliére boursouflure de l’en- soit..grotesque...style pompeux, méprisant et quel fatuité dans le propos ! .".je moinsse et je vous met un de ces petits smiley".


            • Papé Robert 4 février 2008 23:11

              Nous sommes peut-être victimes de notre passé.

              A la sortie de la seconde guerre mondiale, nous avons été éblouis par le monde américain ...et envahis par sa production industrielle.

              Envahis de musique (Yves Montand chantait "dans les plaines du Far West" ) de films westerns et polars, de romans polars et espionnage et de cigarettes.

               

              Les Français ont considéré que le futur rêvé de notre société était cette société américaine dynamique, bon enfant et tellement moderne.

              Tati, avec "Mon oncle" pouvait bien ironiser sur ce nouveau monde, la France glissait de la java vers le jazz, et bientôt le rock, le twist et la suite...

              Aujourd’hui, la consommation culturelle en France est essentiellement américaine. Sur nos radios du service public la majorité des musiques sont américaines...même si les artistes sont européens !

              L’art contemporain est devenu l’exploration du domaine évité jusque là : celui de la laideur facile !...et les Américains sont les apôtres de la facilité !

              Alors notre grande culture qui impose un effort pour sa conception comme pour son approche apparait comme élitiste, voire ésotérique !


              • Sigefroid 5 février 2008 14:04

                Merci pour votre article... on s’interroge beaucoup en France sur cette problématique ... mais ne soyons pas pessimistes surtout. Vous citez des "intellectuels" dont l’objet était de produire de la pensée sur l’homme, la société, son devenir ... Ce n’est plus au goût du jour ... Il s’agit aujourd’hui de consommer, d’un "tout à l’économique" qui exclut bien évidemment l’esprit critique, la pensée, le recul, la mise en perspective ... d’où le succès des "produits" que vous évoqués ... mais dans les coulisses subsistent (lisez les revues spécialisées dans les différentes matières, les bibliographies,...) un nombre de penseurs, intellectuels, écrivains, personnes qui s’interrogent, font avancer la connaissance ... mais qui ne font plus la une des médias ! Et c’est là le vrai problème ! Pivot offrait en prime time tous les vendedis des auteurs, variés, divers, accessibles mais intelligents et intéressants pour la plupart et le grand public pouvait être accroché et découvrir ... aujourd’hui, par manque de présentateurs qualifiés et de volonté médiatique, il faut seul aller débusquer sur le net des auteurs, chercheurs, découvreurs intéressants ou bien ratisser les revues dans les bibliothèques ... c’est la liberté de chacun de faire la démarche ou non et c’est plus compliqué ... Louis XIV que vous évoquez a soutenu les "savants" ... qui le soutenaient !! Les autres n’étaient guère "subsidiés" par la cassette royale ... Mais Louis XIV avait lui-même reçu une éducation et une formation aux antipodes de celle du petit truc qui vous sert aujourd’hui de président ! De plus Louis XIV avait pour ambition la grandeur de la France et tout ce qui pouvait y contribuer ... Depuis la fin de De Gaule, on parle fric, et non grandeur de la Nation, le mot devenu haïssable d’ailleurs ! C’est très important ce changement d’orbitale de sur le comportement des dirigeants qui peuvent ou non, porter haut l’image de la Nation. Trop long à développer bien évidemment.

                Par ailleurs, un abruti ne peut s’entourer que d’abrutis, ça le conforte, et en matière d’abrutis, le monde politique actuel - et pas seulement en France - est une pépinière ! De Gaule avait Malraux et Malraux est un homme qui intellectuellement s’était lui-même ! Mittérand a écarté Foucault, si mes souvenirs sont bons et a gardé Jack Lang qui intellectuellement n’est pas vraiment la lumière qui éclaire le monde, mais il plaisait à une jet set en mal d’organisateurs de soirées champ et caviar... Il reste Jonnhy aujourd’hui : chansonnette simplettes pour un quinqua en mal de romance ! Mais tout cela changera encore ! Restons optimiste je vous dis ! Tout change toujours !


                • Sigefroid 5 février 2008 14:08

                  quelques coquilles, mais j’ai été très vite. mille excuses


                • Ocséna 5 février 2008 14:47

                  Que peut-on dire, vraiment, en vérité sur ce sujet ?

                  Nous sommes pris pour la plupart entre le sentiment que qq chose se dégrade effectivement partout : Moins de logique et de beauté, moins de finesse, moins de classe...

                  Et en même temps on sait bien qu’on ne peut inutilement entretenir une nostalgie d’un autre temps, dont on voit lucidement ce qu’elle a déjà de dépassé, à commencer par l’idée de culture et toute sa forte mythification ravissante et très cuistre.

                  En realité, je veux croire qu’il y a une gestation, les choses sont en changement, peut-être en dépassement, il est seulement très dur par l’esprit de sauter plus loin que son temps. Une idée seulement : la pensée ne s’arrête pas. 

                  Soyons vigilants et très modestes. 

                  http://ocsena.ouvaton.org


                  • Eratosthène 2 mars 2008 21:50

                    Bon, je n’ai pas lu les commentaires, mais bravo pour un si bel article. Effectivement, tout se perd, et l’exemple du Cid évoqué n’est qu’un cas parmi des milliers d’autres, voire des millions.


                    • Eratosthène 2 mars 2008 21:55

                      Je vois que c’est votre premier article.

                      Tu es jeune, il est vrai, mais aux âmes bien nées

                      la valeur n’attend point le nombre des années.

                      Tes articles à deux fois ne se font point connaître

                      Et pour leurs coups d’essai veulent des coups de maître

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