Cette constitution qui les gêne tant
Que c’est embêtant cette constitution qui garantit l’Etat de droit et qui limite votre fonction à deux mandats ! Hugo Chavez vient d’échouer de justesse dans sa réforme de la constitution qui lui aurait permis d’être président à vie. Bush et Poutine en rêvent aussi. Sarkozy, lui, a promis la limitation à deux mandats, mais comme la constitution le gêne d’une autre manière, il veut aussi la réformer...
Habitué aux succès depuis 1998, Hugo Chavez pensait la victoire acquise. Le peuple vénézuélien a rejeté de justesse (à 51 %) sa réforme constitutionnelle qui lui aurait permis de se présenter à la présidentielle sans limite de mandats et d’espérer passer à l’étape suivante : président à vie ! Dans le paquet de la réforme, il y avait aussi le droit de censurer la presse en situation de crise et le contrôle de la banque centrale. Cela sentait un peu la dictature d’autant plus qu’une révision de constitution, dans un Etat de droit, passe par une assemblée constituante et non par la volonté d’un seul homme.
A l’autre point du globe, Poutine s’est organisé un plébiscite grâce à l’intimidation, à la propagande, à l’embrigadement de la jeunesse, au contrôle de la presse, à l’écrasement par la force de l’opposition et, pour finir, par une fraude électorale massive aux élections législatives qui lui pemettra de profiter d’une forte légitimité en vue peut-être de modifier la constitution qui l’empêche de briguer un troisième mandat consécutif.
Aux Etats-Unis, cela semble se terminer pour la saga des Bush. Là-bas aussi, la constitution limite à deux mandats la fonction du président. Les pétrodollars et les puissantes relations aidant, le père Bush avait trouvé la combine en plaçant son rejeton à la Maison-Blanche à sa suite. Il y a quelques mois, fut évoquée la possibilité de placer un frère Bush, mais nous n’en entendons plus parler. Les Etats-Unis étant une grande démocratie, contrairement à la Russie qui en a à peine l’apparence, une révision de la Loi fondamentale semble trop lourde à mettre en oeuvre, pas envisageable.
En France, Sarkozy n’a pu obtenir la vague bleue promise pour le second tour des Législatives. La faute à Borloo et à Fabius qui ont révélé le projet des franchises médicales entre les deux tours. Résultat : la règle du quota des 3/5 des suffrages exprimés au congrès (= Parlement en session spéciale) posée par l’article 89 de notre constitution pour sa révision ne pourrait pas être respectée avec le seul groupe UMP du Parlement. Il a donc fallu renoncer à la méthode expéditive pour user d’un stratagème : désigner une commission de réflexion chargée de confectionner une constitution sur mesure pour Sarkozy, mais tout en donnant un os à ronger à l’opposition (un zeste de scrutin proportionnel, un zeste de ceci, de cela...). François Bayrou, peu dupe dans l’affaire, a dénoncé la manoeuvre lors du congrès de fondation du MoDem. Il a exprimé sa grande déception notamment sur la réforme trop timide du scrutin qui ne permettra pas une représentation plus juste des minorités (les partis qui ont obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés). Bayrou a annoncé qu’il ne votera pas le projet en l’état. Du côté des socialistes, cela devrait passer comme une lettre à la poste. Compte tenu des ralliements nombreux au gouvernement, il se trouvera bien assez de parlementaires pour défendre le projet.
La constitution est au sommet de la hiérarchie des normes ; elle s’impose à l’Etat et à ceux qui le dirigent. Garante de l’Etat de droit et de la stabilité des institutions, il est normal qu’elle soit difficilement révisable, sans quoi elle peut à tout moment ouvrir la porte aux dictatures.
Constitution française de 1958. Extrait :
TITRE XVI
De la révision
L’initiative
de la révision de la Constitution appartient concurremment au président
de la République sur proposition du Premier ministre et aux membres du
Parlement.
Le projet ou la proposition de révision doit être voté par les deux
assemblées en termes identiques. La révision est définitive après avoir
été approuvée par référendum.
Toutefois, le projet de révision n’est pas présenté au référendum
lorsque le président de la République décide de le soumettre au
Parlement convoqué en Congrès ; dans ce cas, le projet de révision n’est
approuvé que s’il réunit la majorité des trois cinquièmes des suffrages
exprimés. Le Bureau du Congrès est celui de l’Assemblée nationale.
Aucune procédure de révision ne peut être engagée ou poursuivie lorsqu’il est porté atteinte à l’intégrité du territoire.
La forme républicaine du gouvernement ne peut faire l’objet d’une révision.
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