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Réforme des institutions : quand l’intérêt personnel des parlementaires est en contradiction avec l’intérêt général de la démocratie

Parmi les points envisagés de réforme constitutionnelle des institutions figurent des sujets qui, s’ils sont nécessaires à l’amélioration de la démocratie et à l’adaptation de l’organisation politique à l’évolution démographique en France, et même recommandés par le Conseil constitutionnel, risquent d’être contraires à des intérêts de la majorité parlementaire et aux intérêts personnels des parlementaires, qui pourtant doivent voter à la majorité des 3/5èmes ces réformes.

Citons notamment :

1- la modification du découpage électoral des circonscriptions, sujet complexe auquel va s’atteler Alain Marleix, spécialiste des questions électorales à l’UMP, récemment nommé secrétaire d’Etat à l’Intérieur et aux Collectivités territoriales ;
2- l’introduction d’une dose de proportionnelle aux élections législatives ;
3- la limitation du cumul des mandats.

Attachons-nous particulièrement au premier point qui concerne le découpage électoral des circonscriptions. Il est notoirement reconnu que le découpage électoral actuel, qui date de 1986 (22 ans !), est devenu obsolète compte tenu de l’évolution démographique, de la migration progressive de population des zones rurales vers les zones urbaines. C’est d’ailleurs non seulement le fait du découpage des circonscriptions sur lesquelles sont fondées les élections législatives au suffrage universel direct des députés à l’Assemblée nationale, mais aussi le fait du mode de scrutin des élections sénatoriales, basées sur un suffrage indirect par des grands électeurs composés à 95% d’élus au sein des conseils municipaux.

Pour les premiers, les députés, il a résulté de l’évolution démographique depuis 1986 que certaines circonscriptions, notamment dans les concentrations urbaines, comptent plus de trois fois plus d’électeurs que d’autres circonscriptions, notamment en zones rurales comme la Lozère. Ce qui pose le problème de la représentativité géographique des députés eu égard à l’importance des populations.

Pour les seconds, les sénateurs, les communes en secteurs urbains ont également perdu de la représentativité en termes de population comparées aux campagnes. Le scrutin actuel fait la part belle aux grands électeurs des petites et moyennes communes.

Cette inégalité dans la représentation de la population aux élections a été démontrée par l’économiste Michel Balinski dans ses articles et études sur le sujet. Ce dernier distingue deux problèmes : celui de la répartition du total des sièges entre les différents départements et celui du découpage des circonscriptions au sein des départements. Le principe constitutionnel d’égalité devant le suffrage voudrait normalement que le nombre de sièges attribués corresponde au poids démographique des circonscriptions, ce qui est loin d’être le cas. A cette inégalité se superpose celle de la non-représentativité proportionnelle des courants politiques, du fait du scrutin majoritaire et non proportionnel, ne permettant qu’aux partis majoritaires d’être représentés. Mais la plupart des citoyens, que les questions constitutionnelles rebutent, ne sont pas vraiment conscients de cette grave lacune de notre démocratie, la presse et les médias parlent peu de ce sujet qui n’est pas vendeur auprès des lecteurs ou auditeurs...

Malgré les recommandations répétées des sages siégeant au Conseil constitutionnel, qui veillent au respect de nos institutions, sur la nécessité de faire évoluer ce découpage électoral, les gouvernements successifs n’ont pas eu le courage de s’y atteler. Il semble pourtant que Nicolas Sarkozy prenne enfin le problème en main et annonce sa prise en compte prochaine dans les réformes institutionnelles.

Or, les résultats électoraux des dernières élections en 2007 et 2008, présidentielle, législative et municipale, ont démontré que l’on votait plus à gauche dans les zones urbaines et plus à droite dans les zones rurales. Par conséquent, le découpage actuel avantage la droite et une évolution logique du redécoupage aligné sur l’évolution démographique de l’électorat, pourrait bien donner un avantage à la gauche aux prochaines élections... La majorité parlementaire d’aujourd’hui devra être courageuse pour se faire hara-kiri !

De plus, la suppression de postes de députés dans les campagnes, engendrée par un regroupement de circonscriptions en zones rurales et au contraire la création de postes dans les zones dont la population s’est accrue (à moins qu’on n’en profite pour réduire le nombre total des députés, comme pour le replacement des fonctionnaires partant à la retraite, afin de faire des économies !), va forcément être mal vue par les députés des campagnes, voyant la concurrence au renouvellement du mandat encore accrue, alors que les députés des grandes villes y seront favorables. La majorité UMP étant plus représentée aujourd’hui par les premiers à l’inverse des députés d’opposition, elle devrait avoir tendance à voter contre ce découpage.

Aussi convient-il de s’interroger sur cette impasse paradoxale dans une démocratie qui se respecte.

Comment espérer faire voter une loi que la majorité des députés ou sénateurs ne souhaitent pas, ou à tout le moins contraire à leurs intérêts personnels ?

De même si la mise en place de la loi implique une évolution prochaine des forces politiques en faveur de l’opposition, la majorité des parlementaires, située du côté de la majorité, va naturellement s’y opposer ...

Concernant l’introduction d’une dose de proportionnelle dans le scrutin législatif, on peut aussi facilement prédire que la majorité acceptera une dose minimum pour faire bonne figure, de l’ordre de 10% ou au mieux 20%, ce qui est ridicule, alors que nos voisins de l’Union européenne sont tous en scrutin proportionnel soit total soit au moins à 50% (l’Allemagne par exemple a mis en place une correction du scrutin majoritaire afin d’y ajouter un nombre de députés des partis minoritaires ayant réalisé plus de 5% des voix de manière à représenter ces partis sur la base de 50% de leurs voix).

Le gouvernement aura fait preuve de bonne volonté démocratique en proposant la loi, qui sera refusée en toute légalité par le Parlement ou modifiée en ne retenant que des éléments symboliques de la proposition initiale, histoire de dire qu’on a essayé de faire quelque chose...


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9 réactions à cet article    


  • bernard29 candidat 007 1er avril 2008 13:43

    Si les points que vous soulevez 

    • 1- la modification du découpage électoral des circonscriptions, sujet complexe auquel va s’atteler Alain Marleix, spécialiste des questions électorales à l’UMP, récemment nommé Secrétaire d’Etat à l’intérieur et aux collectivités territoriales,
    • 2- l’introduction d’une dose de proportionnelle aux élections législatives,
    • 3- la limitation du cumul des mandats

    ont bien été proposés par le "Comité Balladur" , et en particulier en ce qui concerne le non cumul des mandats et fonctions présenté comme "une exigence dans une démocratie moderne" , ils ne font plus partie de l’avant projet de la réforme constitutionnelle présenté par le Premier Ministre, le 19 mars, en Conseil des ministres et au Conseil d’Etat pour avis, avant le débat au Parlement.

    Vous pouvez donc déjà considérer que cette réforme est un leurre démocratique. Cette réforme sarkosi n’est plus en fait qu’une modification mineure du réglement intérieur du fonctionnement des institutions. ce n’est pas la "république irréprochable" promise lors de l’élection présidentielle.

    C’est pour cela qu’il faut combattre cette réforme et demander l’ouverture d’un débat constitutionnel public.

    http://changerlarepublique.over-blog.com/

     


    • YVAN BACHAUD 1er avril 2008 13:48

       


      + Les Français veulent des réformes…

       93% des Français jugent urgent de mener des réformes en France (dont 54% très urgent)." (IFOP 16/05/2006 pour Acteurs publics)

      Il est donc logique qu’ils soient favorable au RIC pour avoir la possibilité de contrôler les réformes et si elle ne viennent pas d’en proposer eux-mêmes.

       

      + Les français veulent pouvoir  aussi décider directement eux-mêmes.

      + En 2007 : Constat des deux finalistes de la Présidentielle sur « la volonté du peuple » en matière de démocratie :

      - N.SARKOZY, à la fin  de son investiture a évoqué ce « peuple français qui ne veut pas  que l’on décide à sa place, et qui par-dessus tout ne veut plus que l’on pense à sa place…“  ( Voir extrait vidéo http://www.ric-france.fr/videos/ns.wmv  )

       . Mais il a pourtant refusé d’organiser un référendum sur le nouveau traité européen..  

      -  S.ROYAL, après des milliers de rencontres avec les citoyens en dressait le bilan sur son site « Désirs d’avenir » en présentant plus de cent propositions.
       On pouvait lire :

      « Une nouvelle présidence »

      Remontée des débats

      Les citoyens veulent prendre la parole plus souvent et plus directement pour décider eux-mêmes.(…) »

       C’est la description même du référendum d’initiative citoyenne…qui n’était pourtant pas dans son programme … 

       Tout cela est sur le site www.ric-france.fr avec une pétition à signer et à la faire connaitre..

      + Cela est confirmé par les sondages…

       - 82 % des Français souhaitent « pouvoir lancer des référendums sur les sujets de leur choix.. »  ( Sofres pour « Lire la politique » du 12 mars 2003). http://www.sofres.fr/etudes/pol/310303_particpol_r.htm

      - 88 % des Français pensent « qu’il faudrait faire un Référendum si un nombre élevé de gens le demandent » p. 112 dans « La Démocratie à l’épreuve » Gérard Grunberg (Presse de Sc-Po)

       - 68% des Français sont pour « Le référendum d’initiative populaire, qui pourrait être

      demandé par 500 000 signatures de citoyens » ( BVA du 11 07.2007 pour le Figaro/LCI )

      http://www.bva.fr/data/sondage/sondage_sondage/589/sondage_fichier/fichier/ rapportraformeinstitutionstd915_623e3.pdf

      Il y a une baisse car la modalité est précisée et que le chiffre de 500.000 a pu écarter des oui qui le considère trop élevé et d’autre faible. Cette modalité est mauvaise.

       Terminons encore par une question du sondage BVA de Juillet 2007 :

      « A qui accorder prioritairement de nouveaux pouvoirs ? Aux citoyens 66%, au Parlement 28% »

       Et rappelons.

      Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 qui fait partie du préambule de notre Constitution.

      Article 6. -  La loi est l’expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement ou par leurs représentants à sa formation.(…) »

        

      « Rien n’est plus fort qu’une idée dont l’heure est venue » V.HUGO

       

       


      • luteola luteola 1er avril 2008 15:22

        on devrait confier ce travail de réactualisation du découpage au conseil constitutionel... car comme le précise l’auteur, il est évident que les parlementaires vont rechigner à se tirer une balle dans le pied.

        Néanmoins, cette situation est scandaleuse. On nous dit que sociologiquement la France est à droite, en fait c’est en partie due juste à une illusion : un découpage electoral n’ayant pas évolué...

        @ l’auteur  : comment les autres pays gèrent ce problème ? Car les migrations ne sont pas l’apanage des français je suppose. Article interressant qui demande une analyse plus poussée, car on touche au coeur de la démocratie ici..


        • fg 1er avril 2008 21:00

          75 % des lois viennent de l’europe et les parlementaires ont voté en congrès leur soumission à cette règlee n adoptant le traité simplifié.

           

          75% du travail étant délocalisé, supprimons 75% des parlementaires, comme dans les entreprises.


          • anny paule 1er avril 2008 21:29

            Plus qu’intéressant, fondamental !

            La question est que nous serons une fois encore menés en bateau ! Ce qui serait exactement démocratique, ce serait un scrutin proportionnel, non pas une dose de proportionnalité dont on sait ce qui en sera fait !

            Encore une fois, on se moque de nous !


            • moebius 2 avril 2008 09:46

              y font rien que de se moquer de nous... mais ont ne peut etre que d’accord avec le contenu de cet article. En matiére de découpage, celui territoriale, voir social de Saint- Maur- des fossés est proprement miraculeux. Ce qui n’aura sans doute pas échappé au Galimero qui sommeille en chacun de nous


              • foufouille foufouille 2 avril 2008 12:59

                comme si ils allaient se reformer tout seul....

                les verts ont inscrit le non cumul ds leur charte du parti. sauf que ... voynet refuse de laisser tomber son poste de senateur !!! ou de maire. les verts vont donc changer leur regles car ils sont concernes


                • antiholiste 6 avril 2008 14:16

                  Absolument, le système politique francais est à l’image de son économie, sclérosé par une oligarchie.

                  En politique, comme en économie, comme je pense pour tout système vivant, la diversité est fondamentale. Sans elle, point de souplesse, point de dynamisme, point d’adaptation, c’est la mort garantie quand survient la première difficulté majeure.

                  L’avenir en France me semble plutôt sombre. S’il n’y a pas une prise de conscience, une rupture franche avec notre culture dirigiste vieille de plusieurs siècles, si les citoyens tels des gamins continuent d’attendre tout de l’Etat, et si l’Etat, nounou, carriériste, démagogue, persiste en retour à vouloir répondre à toutes ces exigences puériles, le déclin n’est pas loin.

                  De la même facon qu’une économie fonctionne de facon optimale quand il y a de la concurrence, un système politique, pour être légitime et efficace, ne peut se passer de la représentativité qu’apporte le scrutin proportionnel. C’est la seule facon d’impliquer tout le monde dans le débat, et ainsi de responsabiliser les électeurs.

                  C’est une hypocrisie pathétique que d’élire 577 députés, pour qu’au final, il n’y en ait qu’une dizaine pour siéger à l’assemblée, et prendre des décisions qui concernent plus de 60 millions de personnes. La réforme des institutions est une nécessité.


                  • noel 15 avril 2008 18:27

                    Je signale sur ce sujet un interessant article :

                    www.liberation.fr/rebonds/chroniques/chronique_politique/317588.FR.php ?

                    si le lien ne marche pas, http://www.liberation.fr/rebonds/chroniques/chronique_politique/317588.FR.p hp?mode=PRINTERFRIENDLY,

                    ou encore:taper sur Google : intitutions 1 chance à saisir a duhamel

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