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À propos de « La Lettre aux éducateurs » : l’opposition entre « éducation » et « instruction », une querelle insensée

Le choix par le président de la République du mot « éducateurs » pour désigner les destinataires de sa lettre, paraît avoir indisposé les tenants d’une école dont le rôle se cantonnerait à « l’instruction » sans s’occuper d’« éducation ».

À la suite de mon article publié hier sur la lettre présidentielle, des lecteurs se sont inquiétés : « Je trouve curieux, écrit l’un, que personne ne soulève la question des éducateurs. Je pensais que les éducateurs étaient les parents. » « Il faudrait revenir, renchérit l’autre, à la dénomination antérieure, ministère de l’Instruction publique ; j’envoie mes enfants à l’école afin qu’ils acquièrent de l’instruction ; pour ce qui est de l’éducation, je m’en charge. »

Une fille bien éduquée selon son père

Ces répliques me rappellent la réaction immédiate du père d’une élève, directeur des « ressources humaines » d’une grande fabrique d’eau minérale, à qui je venais d’apprendre que sa fille fraudait : en d’autres termes, elle copiait sur ses voisins et les intimidait pour que ça ne se sût pas, pensant ingénument que le professeur était myope : « C’est impossible ! s’était-il écrié, outré. Ma fille ne peut pas frauder ! Je lui donne une bonne éducation !  »
Tout est dit ! L’anecdote devrait faire taire cette querelle absurde entre « éducation » et « instruction ». Le père est ici le premier à faire preuve et d’une mauvaise éducation et d’une mauvaise instruction. Il confond prémisses et conclusion dans un syllogisme qui devrait au contraire se présenter ainsi : ma fille fraude ; or je lui donne une bonne éducation ; donc elle n’en a pas encore assimilé la conduite. Mieux, la bonne éducation alléguée est au mieux une hypothèse autovalidante - c’est-à-dire non démontrée ; elle est en tout cas démentie par la conduite même du père qui, refusant par principe tout crédit au professeur, rejette son témoignage parce qu’il contrarie l’image flatteuse qu’il a de lui-même.

Les règles du travail intellectuel

Approuvant la propriété du terme « éducateur » choisi par l’auteur de la lettre, j’avais pourtant, en début d’article, prévenu qu’il n’y avait pas de transmission du savoir sans adoption des règles du travail intellectuel : silence, tour de parole, respect du travail des autres, respect des lieux de travail, respect mutuel des personnes. Comment appeler cet apprentissage sinon une éducation ?

L’exemple désastreux des voyages scolaires

Et quand, comme le recommande avec raison le président de la République, on emmène en voyage ses élèves sur les sites de Campanie ou à Venise, à Munich ou à Salzburg, en car, avec hébergement à l’hôtel, restauration et visite des sites, comment appeler l’apprentissage des conduites de courtoisie à adopter envers les prestataires de service, sinon une éducation ?
Les parents peuvent avoir éduqué leurs enfants comme ils le souhaitent. Pensent-ils que loin d’eux, avec les copines et les copains, ils soient toujours irréprochables ? Le professeur n’a-t-il pas à veiller à faire respecter les règles du savoir-vivre et de la courtoisie partout où il se rend avec ses élèves ? N’est-ce pas une mission obligatoire d’éducation ?

Sait-on comme est désastreuse la réputation que traînent les voyages scolaires auprès des compagnies de car, des hôteliers et des restaurateurs ?
- Il faut tout ignorer de ce qu’il advient d’un car quand une exigence minimale de vie en commun n’interdit pas d’y manger, d’y boire, d’y mâcher des chewing-gums qu’on retrouve immanquablement collés aux sièges de velours, de se taquiner voire de se battre, de hurler, de mettre la musique à tue-tête, et j’en passe.
- Il faut ensuite avoir eu à chercher soi-même un hôtel sur place pour héberger ses élèves. On essuie refus sur refus. Et pour quelle raison ? Les mauvais souvenirs laissés par nombre de groupes scolaires. Combien de fois ne faut-il pas intervenir le soir et la nuit dans l’hôtel où on est soi-même descendu avec ses propres élèves, pour obtenir de groupes d’élèves qui ne sont pas les siens (français et étrangers) qu’ils respectent le sommeil des autres ! Que fait-on alors sinon oeuvre d’éducation, tandis que leurs professeurs dorment sur leurs deux oreilles, adonnés sans doute à la seule instruction dans laquelle on voudrait les cantonner ?

Des élèves reconnaissants

Or, des élèves à qui on explique, dès le début, les règles d’une vie commune de respect mutuel, le comprennent très bien, même s’ils sont tentés forcément de les transgresser. Il appartient au professeur de ne pas transiger en bon éducateur. Ils sont les premiers à apprécier les conditions qui ont fait de leurs cours et de leurs voyages des instants d’épanouissement personnel, voire de bonheur. Ils savent en rendre témoignage, y compris bien des années après.

Opposer instruction et éducation est donc insensé tant l’une et l’autre sont indissolublement liées ; elles se conditionnent mutuellement. C’est sans doute, pour partie, parce qu’on a voulu les dissocier que des comportements violents sont devenus l’ordinaire de nombre d’établissements. Paul Villach



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7 réactions à cet article    


  • zelectron zelectron 2 octobre 2007 17:44

    L’EDUCATION FAIT LA PUISSANCE DES NATIONS

    (Lao Tseu, je crois dans l’art de la guerre)


    • zelectron zelectron 31 mars 2008 20:28

      Sun Tsu plutôt ?


    • Paul Villach Paul Villach 3 octobre 2007 10:12

      Puisse l’Éducation nationale cultiver ses élèves comme vous cultiver vos fleurs ! Paul Villach


    • Tony Pirard 2 octobre 2007 23:47

      Seulement une question de sémantique :éducation c’est celle que nous recevons dans le sein de la famille,meilleur disant,de nos parents.Instruction c’est celle que nous recevons dans l’école. Par l’autre côté la formation de nos maîtres d’enseignements c’est assez important,cet relation entre enfant/maître forme un motif d’admiration par la sagesse des adultes (profs). Elle marquera profondement par le reste de vie écolaire,comme exemple conduite des jeunes étudiants.

      Tony do Brasil


      • Carlos JOBTE Carlos JOBTE 3 octobre 2007 23:07

        bonsoir, Plutôt que de querelles insensées,je perçois la problématique essentielle,inhérente,à la citoyenneté. L’enfant va aussi à l’école pour apprendre à devenir citoyen. Peut-être pour ça que sur des frontons d’antan,se lisait,inscrit telle une loi,le fameux « L’alphabet te rendra maître de ton droit ».


        • Internaute Internaute 5 octobre 2007 09:36

          L’incompréhension vient du fait que vous restreignez dans cet article le terme « éducation » à l’apprentissage des règles de bonnes conduites en société. Tout le monde est d’accord qu’il faut les faire rentrer dans la tête de nos enfants. C’est prioritairement le rôle des familles et en leur absence celui des maîtres. C’est la raison pour laquelle tant de gens cherchent à mettre leurs enfants dans des écoles privés catholiques (même s’ils ne sont pas pratiquant du tout) car ils pensent à juste raison que la majorité des enseigants du public manquent d’éducation et sont donc bien incapables d’en transmettre à leurs enfants.

          Ceci dit, lorsqu’on dit que l’école n’a pas à faire l’éducation des enfants il s’agit de l’éducation politique, c’est à dire de la volonté des gouvernants de modeler les mentalités des jeunes pour les pousser dans des directions qui n’ont plus rien à voir avec la vie en société.

          L’éducation qui consiste à réécrire notre histoire afin de donner aux enfants honte de leur passé est nuisible et ceux qui s’y livrent ne sont plus des enseignants mais des commissaires politiques.

          L’éducation qui consiste à faire croire aux enfants que leur pays ne leur appartient pas, qu’il n’y ont aucun droit supplémentaire que n’importe qui du monde entier est encore plus nuisible car elle détruit les fondements de la société française, le sentiment d’appartenance à une nation.

          L’éducation qui consiste à servir la soupe aux lobbies sionistes pour que nos enfants acceptent ensuite de courber l’échine est tout simplement abjecte. Mes enfants ont subi le livre d’histoire de Nathan (classe de 3°) dans lequel on montre une photo du portail de la cathédrale de Strasbourg et le maître complaisemment décortique la posture d’une des statuettes pour montrer aux enfants que c’est de l’anti-sémitisme. C’est grottesque, digne du bourrage de crâne de la pire époque soviétique. C’est cependant à cette sinistre besogne que se livrent les professeurs et les cadres de l’Education Nationale. Honte à eux !

          En contrepartie de l’énergie dépensée par les maître pour formatter la jeunesse selon les préceptes mondialistes, il y a de moins en moins d’énergie consacrée à l’Instruction, laquelle doit malgré tout rester la raison profonde pour laquelle on envoie nos enfants à l’école. Quand on décrète que 80% des enfants doivent avoir le bac quelque soit leur niveau, quand on accepte que les bases du calcul et de l’écriture ne soient toujours pas maîtrisées en classe de seconde alors on a tout raté. L’EN est devenue une institution nuisible.

          Le bilan de l’EN est catastrophique. On ne pourra améliorer les choses que par une privatisation complète de l’enseignement. L’Etat doit se limiter au contenu de 80% des programmes et assurer le niveau des examens nationaux. Le reste n’est pas son affaire.

          Les français méritent une qualité que seule la liberté de l’enseignement peut leur donner.


          • redo 18 octobre 2007 01:38

            Bonjour Je suis « éducateur spécialisé » diplomé d’état. Mon diplome est signé par le ministère de la justice, le ministère de l’éducation nationnale et le ministère de la santé. Excusez du peut ! Pour obtenir notre diplome nous avons du étudier entre autres matières : de la pédagogie, de la psychologie, de la psycho-pédagogie, de la sociologie, de la pédiatrie, de la psychiatrie, du droit etc.... Nous ne nous considérons pas comme « experts » de l’éducation, mais nous avons un savoir reconu par l’état et une expérience de vie et de travail auprès des enfants, des ados, des jeunes adultes et de leurs familles qui nous permettent de revendiquer ce titre d’« éducateur » et de penser que le galvaudage qui en est fait en ce moment tien plus de la confusion mentale que d’un regard clair de la réalité. Dans cette nouvelle société, personne n’interpelle notre profession pour comprendre ce qui se passe, et tout le monde s’appropie ou se renvoie le titre d’éducateur. Revenons à des valeurs simples : - les parents apprennent à leurs enfants ce qu’ils sont eux mêmes (par copiage, immitation) les valeurs aux quelles ils adhèrent et leur façon de vivre la/en société. - les enseignants apprennent un savoir gradué et préconnisé par l’état ainsi que des rêgles de vie dans une classe, un établissement scolaire. - un entraineur sportif apprend à se servir de son corps et les règles du sport que l’on est venu pratiquer que l’on soit jeune ou adulte. - un employeur apprend et permet d’exercer un métier dignement. - nous sommes tous membres à part entière de cette société française, responsables de ce qui s’y passe et porteur de ses valeurs avec fermeté et tolérance en tant qu’être humain et citoyen. - que chacun reste à sa place devant ses devoirs et cesse de reprocher aux autres ses propres défaillances et ses refus d’implication. Voila, merci

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