Des médailles à tout prix
Jamais, sans doute depuis les Jeux de Berlin en 1936, le leadership au tableau des médailles des Jeux n’aura revêtu une telle importance pour le pays hôte.
Il y a bien longtemps que les jeux Olympiques sont devenus un enjeu politico-médiatique avant d’être la compétition sportive internationale majeure. Les Jeux de Pékin sont, de ce point de vue, très représentatifs.
La Chine a voulu les Jeux pour marquer son grand retour sur la scène mondiale sur le mode « je suis le futur géant, la nouvelle super puissance », le CIO a attribué les Jeux à la Chine pour devancer cette future évidence et offrir aux grands sponsors olympiques une vitrine rêvée pour cibler l’immense marché chinois. Ces Jeux seront donc ceux de tous les superlatifs : le plus grand nombre de chefs d’Etats à la cérémonie d’ouverture, les stades les plus grandioses, le plus grand nombre de volontaires mobilisés…
Dans ce contexte le tableau des médailles va revêtir une importance cruciale pour les autorités chinoises : s’afficher comme la puissance dominante du sport mondial est pour les Chinois une métaphore limpide de leur puissance politique et économique retrouvée, de leur primauté annoncée dans le concert des nations. Le message est aussi bien à usage interne - le sport comme ciment national et opium des peuples, qu’à usage externe : « désormais vous ne pourrez plus nous ignorer ».
L’aléa faisant – encore – partie de la compétition sportive il s’agit dès lors pour les Chinois de réduire la part de hasard à la portion congrue en maîtrisant TOUS les autres paramètres permettant d’atteindre cet objectif de leadership au tableau des médailles. Aussi on peut penser qu’un certain nombre de méthodes vont être utilisées :
- les Chinois vont cibler tous les « petits » sports, c’est-à-dire ceux qui sont les moins médiatiques, mais qui au final comptent autant que les sports olympiques rois (athlétisme, natation). Il ne serait pas étonnant de voir des triplés chinois dans un certain nombre de disciplines ; les « usines à champion » chinoises tournent à plein régime depuis l’attribution le 13 juillet 2001 des Jeux à Pékin ;
- la lutte anti-dopage va connaître un succès inespéré durant ces Jeux ; je fais le pari d’un nombre non négligeable de contrôle positifs visant les favoris, notamment américains, de certaines épreuves (le seul rival pour la première place à la course aux médailles étant bien entendu les Etats-Unis). L’idée n’étant pas forcément de favoriser de façon trop évidente des athlètes chinois mais simplement de réduire la performance des pays concurrents et surtout des Etats-Unis ;
- dans le même registre les athlètes subiront des tracasseries administratives ou logistiques inhabituelles : contrôles plus longs et fastidieux (l’excuse de la sécurité aura bon dos), y compris en matière de contrôle anti-dopage, problèmes de transport, encadrement pointilleux. Le but à atteindre sera simple : rendre la concentration des athlètes – non chinois – et leur préparation plus difficiles et donc diminuer leur performance potentielle.
Bien sûr des grains de sable peuvent toujours venir gripper cette belle machine, mais pour moi le pronostic est clair : la Chine sera devant au tableau des médailles.
Ainsi le gouvernement chinois pourra se prévaloir d’un sans-faute : depuis la cérémonie d’ouverture où les grands de ce monde se montreront tout sourire et sans un mot sur les droits de l’homme, jusqu’à la cérémonie de clôture et un beau numéro 1 accroché au tableau des médailles. Les Jeux de Pékin seront alors le point d’inflexion historique qui aura vu la Chine saisir le flambeau de la super puissance des mains des Etats-Unis.
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